vendredi 8 août 2008

On dresse la table


Les tables à pied, qui restent à demeure sont rares.

Au moment du repas, les valets « dressent la table »; ils prennent des planches et des tréteaux, posés contre un mur de la grande pièce, et les recouvrent de nappes blanches.

Lors des grandes fêtes, lorsque les convives sont nombreux, la table est dressée en U.

Les convives se placent d’un seul côté, l’autre est destiné au service.

Sur les nappes, les servantes disposent quelques écuelles d’étain, quelques couteaux et quelques Hanaps, sorte de grands vases à boire. La fourchette n’existe pas encore.

Plusieurs personnes partagent couteaux et Hanaps.

Le seigneur, la dame et les hôtes que l’on veut honorer ont droit pour s’asseoir à un fauteuil en bois ou en métal doré, juché sur une estrade.

Mais le siège par excellence reste le banc; quelques fois muni d’un dossier sculpté, il peut être divisé en stalles comme la « Fourme », couvert d’une pièce d’étoffe comme le « Banquier », rembourré de coussins, les « Carreaux ».

Ces bancs sont à l’origine du verbe banqueter et du mot banquet.

Les escabeaux appelés « Selettes » sont très répandus, mais le plus souvent, écuyers et demoiselles s’assoient sur des bottes de paille recouvertes de tissus.

Les servantes et valets sont à eux assis à même le sol.

Au moment de passer à table, la dame demande que l’on « corne l’eau » : une sonnerie de cor annonce que le repas va commencer. Les convives sont invités à se laver les mains dans de grandes cuvettes et à les essuyer sur les « ailles » (serviettes) parfumées que leur tendent les domestiques.

Les valets apportent des cuisines les plats recouverts d’un tissus pour les garder au chaud
( d’où l’expression « mettre le couvert » ).

Les mets sont placés sur la table tous en même temps et dégustés dans l’ordre choisi par chaque convive.

On se sert à tour de rôle avec les trois premiers doigts de la main droite, que l’on essuie ensuite à la nappe.

Les viandes sont coupées en morceaux, lesquels sont posés sur une grande tranche de pain : le « Tranchoir ».

Après avoir mangé la viande, on savoure le tranchoir imbibé de sauces; mais lors de grands dîners, on ramasse les tranchoirs dans des corbeilles pour les distribuer aux pauvres.

Lorsque le repas est terminé, la table est enlevée.

Les Repas


Au Moyen Age, on prend généralement deux repas principaux : le dîner, entre dix heures et onze heures du matin, et le souper, entre seize heures et dix-sept heures. Entre les deux, on peut intercaler un goûter, dit marande.

L’Eglise prescrit le jeune presqu’un tiers de l’année : 2 jours par semaine en temps ordinaire ( mercredi et vendredi ); 3 jours pendant les semaines de l’Avent ( 40 jours avant Noël ); tous les jours sauf le dimanche pendant le carême ( 40 jours avant Pâques ).

Il faut s’abstenir de tout produit animal ( même les œufs et les laitages ), excepté le poisson.

Personnes, sauf les moines, ne respecte ces obligations à la lettre. Néanmoins, ce sont elles qui encouragent la consommation de poisson.

Cela explique également la coutume des œufs de Pâques : les œufs, interdits pendant tout le carême, font leur réapparition à Pâques.

Pendant ces journées de jeûne, on ne doit en principe manger qu’une seule fois par jour, en fin de matinée. Mais l’Eglise autorise une collation le soir et dispense du jeûne les malades, les infirmes, les convalescents, les femmes enceintes, les nourrices, les pauvres et tous ceux qui sont astreints à un travail intensif.

Les Viandes


L’alimentation carnée constitue un apport essentiel de nourriture.

Les seigneurs en font une consommation très importante, les pauvres pour leur part abusent du lard.

Les viandes consommées sont surtout le gibier, les volailles et le porc.

Parmi les viandes de boucherie, seul le porc est très répandu, car il peut facilement être conservé en salaison. Les autres viandes sont que très rarement consommées : le mouton est surtout élevé pour sa laine, le boeuf comme animal de trait. Quant au cheval, c’est un animal noble qui n’est jamais mangé.

Le gibier reste la viande la plus recherchée par les seigneurs.

On distingue le gibier noble que sont les cerfs, les daims, les chevreuils, les sangliers, les faisans et les coqs de bruyère, réservés à la noblesse; et le menu gibier, lièvres, lapins, hérissons et écureuils, mais aussi perdrix et toutes sortes de petits oiseaux, grives, étourneaux, merles et coucous !

Les gros oiseaux tels que hérons, grues, oies sauvages..., sont particulièrement appréciés sur les grandes tables.

Ces animaux sont parfois merveilleusement présentés, reconstitués et ornés de leur tête, de leurs plumes ou de leurs pattes.

Selon les viandes, la chair peut être rôtie, bouillie, servie en ragoûts avec des sauces relevées de vin ou de verjus, réduite en « charpie » ( hachis ) ou en pâtés.

On usait beaucoup de farces, de liaisons à la mie de pain trempée et passée à la passoire.

On fabriquait quantité d’assaisonnements où entraient la cannelle, le safran, le poivre, le gingembre ou autres condiments, et on les gardait toutes prêtes pour s’en servir à l’occasion. La tradition de ces « fonds de sauce » s’est conservée jusqu’à nos jours dans la cuisine française.

Le Poisson

Le poisson est également beaucoup consommé, surtout les jours où la viande est interdite par l’Eglise.

Sauf sur les côtes, ce sont des poissons de rivières : saumon, lamproie, brochet, anguille.

Ils sont toujours accompagnés d’une sauce ou d’une farce dans la composition de laquelle entrent d’innombrables épices et condiments: cultivés dans le verger ( oignon, ail, persil, fenouil, oseille, cerfeuil ), cueillis autour du château ( thym, menthe, romarin, marjolaine, champignons ) ou bien importés d’Orient et ils sont alors très précieux ( poivre, cannelle, cumin, girofle ).

Si elles ne sont pas piquantes, on sucre les sauces avec du miel.

Fruits et Légumes

Au Moyen Age, on consomme une grande variété de légumes : poireaux, carottes, navets, raves, chicorées, choux, laitues, cresson, asperges, haricots verts, lentilles, fèves et pois.

Les petits pois, les tomates et surtout les pommes de terre sont encore inconnus.

Généralement, les légumes sont utilisés pour épaissir les jus de viande. Ils peuvent être mis en conserve dans le vinaigre ou la moutarde.

Seules les salades sont mangées fraîches et assaisonnées d’huile.


Les fruits sont peu cultivés, si l’on excepte les pommes. On trouve néanmoins poires, coings, pèches, cerises, prunes, raisins, ainsi que noix ( fruit préféré de Charlemagne ), noisettes, nèfles, prunelles...

Les fraises, groseilles, framboises et mûres ne sont pas très appréciées, au contraire des fruits exotiques. Aux dattes, pistaches et grenades, les croisades ont ajouté les oranges, les citrons et les abricots. Ces fruits sont rares et le plus souvent mangés confits.

Comme les légumes, les fruits sont conservés, sous forme de confitures.

jeudi 7 août 2008

Les Pâtisseries


Les gâteaux sont très variés, depuis les beignets, les pets-de-nonne, les nieules, parfumées à l’anis, les gaufres, jusqu’aux feuilletés, mentionnés pour la première fois en 1311.

Le jour de l’Epiphanie, on mange du « Gatel à fève », ancêtre de la galette des rois.

Dans les festins, on sert beaucoup de tartes et de flans. Ceux-ci sont mêlés de graisse, assaisonnés de raisins secs et cuits à l’eau. Une fois refroidis, ils sont découpés en tranches dorées à la poêle et saupoudrés d’épices.

Il existe une grande variété de tartes : les « jacobines » sont au fromage gras, parfumées à l’orange, les « talmousses » au fromage blanc. Les « darioles » sont parfumées à la cannelle.

Le « blanc manger » est une gelée à base d’amandes pilées qui peut être colorée en jaune avec du safran, en rouge avec du tournesol, en vert avec de l’oseille.

Le rôle du Sel


On consomme beaucoup de sel au Moyen Age : du gros sel en cuisine et du sel fin à table.


Mais le sel a surtout une importance vitale pour conserver les aliments : le fromage, la viande, le poisson, notamment le hareng et la baleine consommés en Carême, mais aussi le beurre salé, qui est déjà une spécialité normande.

Cela donne l’idée à Philippe VI, en 1342, d’inventer la gabelle, qui monopolise le commerce du sel et oblige chaque famille à venir se fournir dans les greniers à sel royaux, où il est lourdement taxé.


Ce nouvel impôt devient très vite impopulaire, et suscite de multiples ruses pour y échapper

Boire


Le vin joue un rôle fondamental; il est apprécié par toutes les classes de la société, et il est nécessaire au culte de la messe.

Les difficultés de transport et de conservation ont poussé à implanter des vignes jusque très au nord. ( Philippe Auguste en fit pousser dans la cour du Louvre ).

Les consommations sont très importantes : en moyenne 2 litres par personne et par jour. Mais le goût penche vers des vins légers et peu alcoolisés.

Jusqu’au XIIIéme siècle, on préfère les vins blancs.

Le vin est consommé quelques semaines après les vendanges car on ne boit que du vin de l’année ( la bouteille fermée avec un bouchon de liège ne se développera qu’au XVIIIéme siècle ).

Le commerce du vin est général à travers le royaume, par chariots ou par voies d’eau.
Bordeaux, devenue terre anglaise, exporte plusieurs dizaines de milliers de tonneaux par an vers l’Angleterre.

Au XIIIéme siècle, le goût des vins forts se répand. Les vins rouges de Beaune, que l’on boit à la cour du roi de France, sont les plus fameux et les plus chers.

Les vins liquoreux deviennent aussi très en vogue. Importés de l’étranger, ils ne seront pas produits en France avant le XVéme siècle. Le plus célèbre est le vin de Chypre.

A côté de ces vins de luxe, on trouve des vins herbés et des vins pimentés.
Les vins herbés sont des vins cuits, sucrés et parfumés de plantes odorantes telles que romarin, anis, absinthe, aloès ou myrte.
Les vins pimentés, également cuits et sucrés au miel, sont aromatisés avec des épices : cannelle, girofle, gingembre, noix muscade. L’Hypocras est le plus célèbre de ces vins étranges.

Les premières tentatives de distillation sont réalisées au XIVéme siècle par un médecin, Arnaud de Villeuneuve, qui donne le résultat de ses recherches, rapidement appelé « eau-de-vie », comme médication à ses malades. Celle-ci est vendue par les apothicaires.

La bière, ou cervoise, peu appréciée, est la boisson des pauvres dans les régions ou l’on trouve peu de vin.

Le cidre ( pomade ) est méprisé, mais l’on boit souvent des vins de poire ( poiré ), de cerise ( cerisé ) et surtout de mûre ( moré ), qui sont des boissons plus fortes.

Quant au lait, c’est une nourriture de nouveau-né qu’un adulte ne consomme jamais.

Le Pain




Le pain est la base de l’alimentation. On en consomme 1 à 2 kilos par jour.

Au temps des Carolingiens, il est fabriqué et cuit à la maison. Plus tard, à l’époque féodale, le pain est porté au moulin et au four du seigneur.
Dans les villes, les « Fourniers » cuisent le pain des particuliers et se payent d’un pain pour vingt-cinq.

A la fin du Moyen Age, les pains, dont il existe de multiples variétés, sont fabriqués par les Boulangers qui ont pris ce nom du jour où ils se sont mis à fabriquer des pains en forme de boules. Ils s’appelaient auparavant « les Talmiciers », du nom du tamis qu’ils utilisaient pour séparer le son de la farine.

Mais la fabrication domestique se maintient chez les plus pauvres comme chez les plus riches. Dans les grands châteaux, un « Panetier » en a la charge.

Chez le boulanger, on achète le beau pain de « primor » fait avec la fleur de farine. Si on a besoin d’un pain qui se conserve très longtemps, on choisit le pain « bis-cuit », très dur parce que cuit deux fois.

Les riches achètent le « Pain de Gonesse », petit pain mollet très tendre, ou un des nombreux pains blancs et moelleux présentés sur l’étalage : « pain de pape », « de pair », « de chevalier »...
Les pauvres se contentent de pains grossiers : pain de millet, d’avoine, ou pain d’orge, que l’on mange en temps de pénitence.
Le pain de seigle a la réputation de maintenir « les femmes plus belles et plus fraîches » et les médecins en conseillent la consommation de temps à autre aux patients dont les entrailles sont en mauvais état.

Les Flamands et les Bretons apprécient beaucoup les pains et les galettes confectionnées avec de la farine de blé noir dite de « sarrasin » qui fut apportée via l’Espagne par les invasions sarrasines.

Parfois le boulanger essaie d’écouler un pain « raté », qui a été rongé par un rat. Le sens de ce terme; s'étendra plus tard.

La Soupe

A la campagne, on mange très fréquemment la « Soupe » qui est simplement une tranche de pain trempée dans un bouillon ou dans du vin.
Plus tard, le terme de soupe finit par désigner le bouillon lui même, qui peut être parfumé d’oignons, de moutarde, de safran, qui lui donne une teinte jaune, ou de lait d’amandes qui le blanchit.

La Tostée

La « Tostée » est une tranche de pain grillée ( du latin tostare : griller ) que l’on place au fond d’une coupe de vin passant de main en main jusqu’à l’hôte en l’honneur de qui l’on boit. Ce dernier vide la coupe et a le privilège de manger la tostée : de là vient l’expression « porter un toast »